Le soleil tape sur Melbourne, et c’est dans ces moments-là que je regrette d’avoir accepté ce job. Je sens la transpiration dans ma nuque, qui coule le long de mon dos pour tremper mon caleçon. D’habitude, l’hiver, je mettais un tee-shirt et un short en dessous, mais étant donné la chaleur d’aujourd’hui… Je crois que je vais bouillir. Mais je suis en fin de service, je termine dans dix minutes.

Me voilà libre. J’étais tellement trempé de sueur, que cette fois-ci, les douches du fast-food m’ont paru être celles d’un hôtel de luxe. L’eau froide m’a détendu, mais la chaleur qui rode encore dans les rues (et encore pire : dans le métro) me rend sur les nerfs.

Une heure. Une longue heure de trajet. D’habitude, je mets moins de temps pour faire un aller-retour, mais là, il y a eu un con qui s’est jeté sous le métro. Quel connard ! Il n’aurait pas pu attendre que je sorte du tunnel et que je puisse prendre une VRAIE douche, chez MOI. Bref, je suis rentrée chez moi, et j’ai pris une bonne douche. Maintenant, j’attends les premiers battements de batterie pour sortir. Cela fait très longtemps que je n’ai pas passé de soirée chez moi, seul, à fumer un paquet entier à écouter de la BONNE musique. Ça me manque… Mais, je m’amuse quand même bien dehors. Tiens ! Si je passais à la boite en bas de l’immeuble ? Bonne idée.
Dix minutes plus tard, je pouvais sentir le sol vibrer quelque peu, et puis une musique démarrer doucement. Je me lève alors, enfile ma veste en cuire par-dessus mon tee-shirt blanc et ajuste mon jean. Je sors en prenant soin de fermer ma porte à double tours. Les voleurs rodent tellement.

Je suis assis à une table, seul, avec un cocktail. Mise à part la musique merdique à souhait, c’était plutôt agréable. J’attends depuis deux minutes que quelqu’un montre sur la scène, je suis arrivé pique entre la transition de deux danseuses. Je sirote mon cocktail et analyse la salle. Que des hommes, pas étonnant.
Les lumières s’allument, et une ambiance rouge sensuel enrobe la pièce. Plusieurs hommes s’installent plus confortablement dans leur fauteuil, et quelques serveurs déambulent rapidement entres les tables pour resservir les clients.

« Un autre verre monsieur ? »

Je lève les yeux, et vérifie mon verre. Je l’avais terminé sans m’en rendre compte. Génial, tout mon fric allait passer dedans.

« Oui, s’il vous plait. »

Je le vois partir, et revenir avec mon verre juste à temps pour voir les jambes interminables de la danseuse arriver sur scène. Ça commençait bien dis donc. Elle commença son show, et ceux du premier rang commencèrent à jeter des billets, très, très, très, très subtile. Je hais ce genre d’homme, ils pourraient admirer cette jolie brune en restant… Courtois.
Je me lève, vais au bar et commande de bière, question de réserve. On me les serve fraiche, et je reviens à ma table, attendant que le temps passe.

Forcément, une minute après le début du show, j’en suis à la moitié de ma deuxième bière, et vu leur prix, je devrais m’arrêter un peu. Mais je n’en ai pas réellement envie, je veux me saouler la gueule pour que tous ces hommes qui trompent leur femme avec leur main deviennent moins ennuyeux. Je veux devenir un peu moins chiant, et énervé. Rien que me détendre et oublier cette journée minable. Je commande alors un cocktail plus fort, plus alcoolisé et laisse mes verres de bières encore mousseux sur le coin de la table.
Le serveur est toujours aussi rapide et m’amène ce que j’ai commandé. Une gorgée me révèle que c’est bien le cocktail le plus serré que jamais et j’en suis fort content. J’en bois quelques petites gorgés, rien de bien méchant. Je ne crains pas tellement l’alcool. Puis une envie de cigarette monte, de plus en plus fort. Aucun panneau n’indique que fumer n’est interdit alors je ne me prive pas et sors une cigarette de mon paquet. Je l’allume et en tire une bouffée réconfortante.
La jeune fille qui se dandine sur scène a déjà quelques billets, et j’en suis ravi pour elle. Elle se paiera à manger, voir son loyer. D’ailleurs, je crois que c’est l’une des filles qui habitent dans l’immeuble, du moins… Je crois. Sa petite bouille me dit quelque chose. Ces longs cheveux bruns, aussi. Mais son visage, maquillé, presque pas. Sans cette couche de trucs inutiles, elle serait sûrement vachement plus jolie. Et ces talons hauts ne la mettent guère en valeur, seulement, elles la rendent plus grande et plus vulgaire. J’apprécie moyennement. Bon, c’est vrai qu’en homme normalement constitué, elle me fait de l’effet de cette petite tenue noire, mais ça s’arrête là. Et puis elle me regarde et me sourit, rien de très extravagant. Seulement… un sourire. Mais spécial. Pas quelque chose d’aguicheur du genre « donne moi ton blé bébé. », non, de plus doux et gentil. Tant mieux, car je ne lui donnerais rien. Tout mon argent passe déjà dans les boissons, donc hein. Je continue à la regarder, elle se dandine.
Je pensais que le club était plus ennuyeux, moins bien agencé et décoré. Je suis surpris. Agréablement, s’entend. Je reviendrais, sûr. Pourtant, j’y étais déjà allé, mais tout a changé. C’est vachement plus jolie et plus… Sensuelle. Ça donne un charme à la pièce et aux danseuses.
Je termine mon cocktail, aussi vite que tous les autres et je réserve le même sort à un autre verre. Je lève la main, demande la même chose au serveur qui me sourit. Il se dit que plus je commande un verre, plus son salaire sera un peu plus primé. J’en suis content pour lui, mais mon porte-monnaie est un peu moins d’accord.
Le cocktail arrive, j’en sirote quelques gorgées, et me détend. Je crois que l’alcool commence à faire effet, enfin.

Ma tête est comme moins lourde, je me sens bien. Et c’est dans ces moments que je me dis que j’adore l’alcool. Ça me fait un bien fou ! Mon deuxième verre se vide, mais lentement cette fois. Ma gorge commence à chauffer. Agréable et tonifiant.
Puis les lumières commencent à s’éteindre et la musique ralentit. Les battements de basse et de grosse caisse sont de plus en plus espacés. La jeune femme ramasse ses billets plus ou moins durement gagné et part vite de la scène, comme soulagée.
Après tout, je la comprends. Je n’aimerais pas entrer sur scène, habillé d’une petite tenue noir tout à fait sexy et me dandiner devant une barre en fer froide et d’un groupe d’homme (ou de femmes). En même temps, je crains que cette tenue m’aille de toute manière.
Je ris à cette pensée, en m’imaginant sur cette scène éclairée de faisceaux rouges. Pour calmer ce début de fou rire, je bus une longue gorgée de mon verre, et entendit un bruit. LE bruit fatidique : le verre est vide. Je demande alors au serveur un verre, il me fait un signe de tête pour me dire que c’est ok. Apparemment, le petit show de la demoiselle a assoiffé tous les hommes et le serveur est quelque peu débordé. Je ne suis pas pressé, l’alcool n’est pas la chose qui me tient en haleine.
D’ailleurs je me rappelle de ma cigarette, en regardant ma main gauche, je vois qu’elle s’est vachement consumée. Envoutante. La demoiselle est envoutante, sans que je ne m’en rende compte j’avais oublié ma cigarette. Je l’écrase contre le cendrier est sort mon paquet, au même moment, une vois s’élève doucement à côté de moi.

« Comment tu trouves le club? »

Je lève les yeux tout en mettant une nouvelle cigarette entre mes lèvres. Je range mon paquet et l’allume tout en la regardant. Pourquoi quelqu’un me parlant, et en plus une femme… Je la regarde, l’analyse sans me gêner et la reconnait.

« La jeune fille sur scène ! » dis-je tout haut.

Je tire une longue bouffée, la deuxième de la soirée et elle me fait le même effet que la première. Réconforté, je m’assois un peu mieux dans mon fauteuil noir et me tourne vers la jeune brune.

« C’est bruyant. Et envoutant. » Répond-je à sa question.

Je recrache la fumée par le nez et bois une petite gorgée. Le mélange est explosif et me brûle le palet et la gorge. Ce n’est pas désagréable, d’ailleurs, je recommence à le faire. Bouffée de fumée, et gorgée de cocktail. J’en aurais presque oublié la demoiselle. Je tourne ma tête vers elle et lui sourit. Je vois son verre de bière presque vide.

« Une autre bière ? Une cigarette ? Autant se mettre bien, non ? » la questionnes-je.

Je pose mon paquet sur la table en prenant soin de le laisser ouvert pour que la demoiselle puisse se servir. Je n’étais en rien radin avec les clopes, je me fiche du prix que je mets dans ces merdes, car je sais que ça me fera du bien. J’en donnais même au mineur, les pauvres, ils étaient interdis de tant de chose.

« Je préfère Lexie. » me dit-elle.

Au début, je n’ai pas compris. Mais après quelques secondes. Je l’ai nommé « la fille sur scène ». Bah écoute cocotte, je ne connaissais pas ton nom donc. Je lui souris, et lui dis que je l’appellerais Lexie dorénavant. Après quelques minutes, elle me dit que les deux lui tentent. Je sors donc mon briquet et le pose sur la table. Et je lève la main au serveur qui vient de suite, avant que je puisse lui demander une bière, il me dit que ma boisson arrive. Je lui ris, et lui demande alors s’il peut m’apporter une bière ne même temps. Il me sourit, content de voir que ma facture sera un peu plus grande. Connard. Mais je le remercie quand même.

« Au fait c'est quoi ton nom? Je t'ai jamais vu ici. »

Je tourne la tête vers elle, et lève un sourcil. Comment peut-elle reconnaitre tous les mecs qui sont là ? J’en sais rien, mais de toute manière, chapeau. Ou peut-être qu’elle ne le sait pas au fond… On s’en fout.

« Sam. Et non, le club me fait déjà assez de mal la nuit pour que j’y passe mes soirées. » Souris-je.

Je ne lui dis pas que j’habite dans l’immeuble, ma vie n’est pas intéressante et ça ne lui apportera rien. Je prends une autre bouffée de cigarette et attend. Attend. Attend. Je veux mon cocktail bordel !
Aussi tôt dis (penser) aussi tôt fait ! Le beau verre de cocktail fort est posé devant moi, et une bière dans le coin de la table. Je remercie le serveur, et une fois qu’il fut partit, je tends le grande verre de bière à la demoiselle et soufflant « santé ! ». Je prends alors mon verre, et reprend une autre bouffée puis une gorgée. Ça brûle tellement que je ne sens pas la douleur. Génial. J’adore !
Je recrache la fumée par le nez en la faisant monter vers le plafond. Ma tête se balance derrière le fauteuil et je ferme les yeux. J’attends la prochaine jeune fille qui montera sur scène. L’autre nana, enfin Lexie n’est pas bien bavarde. Je lève une paupière et la regarde. Elle boit dans son verre. Je referme l’œil et trouve une question à lui poser.

« Tu n’habites pas dans cet immeuble par hasard ? » fis-je en levant la tête.

Je pose mon bras sur la table et y pose ma table en la regardant. J’ai peur que l’alcool commence à faire effet et donc que je fasse un peu n’importe quoi. Je sens plutôt une fatigue qui s’installe pour l’instant, mais sait-on jamais.

Elle saisit sa chope de bière et prend en même temps une cigarette. Une fois qu’elle prit tout ce qui y a à prendre, je range mon paquet et la regarde. Elle enlève son filtre et l’allume rapidement. Bouah, elle a enlevé son filtre, quel horreur. Enfin je dis ça, j’ai jamais essayé.

« Si. C'est franchement pratique de pouvoir travailler ici. Même si je préfèrerais une autre vie... » répond t’elle.

Tout le monde aurait voulu un palace à la place de cet immeuble, t’en fais pas ma chère. J’aurais voulu devenir avocat, ne pas avoir trainé dans mes études, et surtout ne pas avoir décroché ce putain de boulot à la con. J’aurais voulu une femme, une magnifique femme. Brune, yeux vert foncé, bien foutu, grande, amoureuse et passionnée. J’aurais succombé à son charme fou, et elle au mien (forcément !). Nous aurions fait deux magnifiques bambins, ou peut-être plus.
Mais non, je suis là, à attendre une autre fille aussi jolie que cette Lexie ; à habiter dans un immeuble miteux (mais mon appart’ est si bien décoré) ; à faire le poulet cinq jours sur sept et huit heures sur vingt quatre. Ma vie est un enfer, autant que ceux qui habitent ici.

« Je comprends… » dis-je las.

Mon moral est descendu tellement bas. Je commande d’ailleurs un autre cocktail, alors que celui que j’ai dans la main n’est même pas terminé. Le serveur a toujours son air « gros con, arrête de te saouler la gueule, tu perds ton fric ».

« Tu fais quoi de ta vie, toi? Je suis sur que ça doit mieux que... ça. »

Fou rire. J’explose de rire, à en faire tomber ma cigarette d’entre les deux. Plusieurs hommes se tournent vers moi d’un air détaché et se remette à leur place pour ne pas rater le début du spectacle. Je ramasse ma cigarette et m’excuse auprès d’elle de l’avoir faite tomber (alcool quand tu nous tiens) et je me tourne vers Lexie. La pauvre, elle va voir la facette de moi que je hais, celle bourrée à souhait.

« Je fais le poulet. » répond-je simplement, mais je me dis que ce n’est pas assez explicite. « je suis mascotte d’un fast-food au bout de la ville. Je me déguise en poulet pour attirer des clients. Je crois que je ne vaux pas autant que toi, ma chère. » souris-je.

« Je comprends… » dis-il las.

Je vois son visage se décomposer. Apparemment, il était dans la même situation que moi. Sa vie ne doit pas être celle qu'il voulait ou espérait. Puis j'aperçois son expression quelques peu dégoutée quand il a vu que j'avais détacher le filtre de la cigarette. Je lève un sourcil puis avale une très grande gorgée de bière. Une moue interrogative se dessine sur ma figure. Un cocktail un peu plus fort me tente. Je me retourne vers Jay et demande un gin. Il acquiesce mais a perdu son sourire. Allez savoir pourquoi. Je crois qu'il n'aime pas tellement que je fréquente des clients. Sam éclate de rire, fait tomber sa cigarette, auprès de la quelle il s'excuse. Je crois qu'il commence à devenir un petit peu bourré. Mais ça me fait rire plus qu'autre chose. J'espère juste que je ne finirais pas bourrée car je peux faire de nombreuses choses regrettables.

« Je fais le poulet. » je pouffe discrètement. « je suis mascotte d’un fast-food au bout de la ville. Je me déguise en poulet pour attirer des clients. Je crois que je ne vaux pas autant que toi, ma chère. » souris-t-il.

Je souris, c'est assez amusant comme idée, mais ca devait être assez chiant. Je finis très rapidement ma bière, puis le serveur vient me servir un gin. Je susurre un "merci" et commence à le boire. Ma cigarette est déjà finie, je l'écrase dans le cendrier. La musique recommence et les jeux de lumières se mettent en place. La plus jeune des danseuses marchent alors sur scène sur ses hauts talons. Elle porte une tenue rouge. Les hommes lancent des billets verts à ses pieds.

Elle sourit. Elle sourit à l’idée de m’imaginer en poulet. Je hais ce job, mais pour l’instant je m’en fous. Je sens l’alcool qui coule dans mes veines, et petit à petit je sens un semblant d’énergie remonter en surface mais il faut que je reste calme car la musique recommence et je ne veux pas déranger la jeune fille sur scène. Elle a l’air mal à l’aise dans ses talons mais elle est sauvagement canon.
Alors qu’elle s’avance devant tous les hommes vers le devant de la scène, quelques billets verts commencent à voler à ses pieds. Ses cheveux blonds et longs font comme une crinière farouche, et les lumières lui donnent une aura, tel un ange venu de nulle part pour faire plaisirs à ces hommes.
C’est à ce moment là que mon cocktail arrive, je remercie le serveur avec un sourire des plus magnifiques et termine l’autre verre d’une traite pour m’attaquer à celui qui vient d’arriver. Qu’est ce que c’est bon ! Les bières me suffisaient d’habitude, mais depuis que j’avais bu une gorgée de… qu’est ce que c’est enfait ? J’avais demandé le plus fort (et je suis très content de sa… force) mais le serveur ne m’a pas dit le nom. Tant pis. Donc depuis que j’avais bu une gorgée de ce truc, tout parait fade et mauvais.
Alors que la blondinette dansait, je jette un œil à cette Lexie. Elle avait l’air d’apprécier le spectacle. C’était agréable mais sans plus, et je me demandais ce que ça faisait d’être à l’envers. Enfin, de regarder les autres danser au lieu de le faire. (J’aimerais bien voir quelqu’un faire le poulet tiens…).
J’ai faim. Oh oui, j’ai faim !
Je me lève et va vers le bar. Je demande s’il y a quelque chose à manger et il me répond que la seule chose à manger est un petit bol de chips. J’accepte avec grand plaisirs et attend qu’il me prépare mon petit festin. Une fois fait, je retourne à mon fauteuil en posant le bol le plus délicatement possible pour éviter de faire du bruit, mais un son cristallin s’élève quand même du choc entre la table et la porcelaine. Personne ne s’en est rendu compte de toute manière.
Le verre de Lexie est vide. Bouh, ça me désole pour elle. Je commande alors deux cocktails chacun, les plus forts bien sûr. Le visage du serveur ne me fait plus rien, s’il savait comme j’en ai rien à foutre de mon fric (enfin…). Bref, quand les quatre boissons arrivent, je jette une boule de papier qui était d’un de mes verres sur Lexie. Si je l’appelle, tout le monde va se retourner, et je veux être discret. Je tends deux à la miss. Je dis une nouvelle fois « santé » en souriant.

Le petit bruit de nos deux verres qui se cognent me fit rire. A savoir pourquoi, j’aimais bien ce bruit. Ça annonçait une beuverie incroyable (plus ou moins…). Enfin, dans tous les cas, ce petit son cristallin me plaisait très fortement. Je bus une gorgée très rapidement pour fêter ses verres achetés et m’enfonça dans mon siège. Hmm, extase. Jubilation exquise.

« Tu fais aussi prostituée?! » entendis-je.

Quel connard venait gêner ma paix spirituelle ? Je suis (ou j’étais) entrain de faire une offrande à mon cher foie. Je lève une paupière, puis une deuxième et je vois un drôle de spectacle. Un homme, dans le genre gros porc avec se chemise à moitié ouverte et de grosses chaines carrément has been, retourné vers Lexie, tête baissée vers son verre. Question soumission, elle a l’air d’être championne (sans aucunes arrières pensées). Mais je vois dans ses yeux, dans son regard plus proprement dit, une certaine rage. Bon, il fait pas chier lui. Je termine mon verre d’une vitesse qui me brûle la gorge, le palais et tout autre chose qui a touché le liquide et me lève.

« Fais pas chier, bordel. »

Je me surprends à chanceler quelque peu. Et oui, faire le héros, apparemment, ça fatigue. Ou bien c’est tous ces verres que je me suis enfilé. Quoi qu’il en soit, je ne me sens pas super bien une fois debout. L’homme rigole, gorge déployée, et se lève à son tour. Il commence à crier quelque chose, mais je n’écoute pas. Je prends mon verre, bois une gorgée et sens une main sur mon épaule.

« Calmons-nous. » dit la personne qui me tient debout.

J’ai chaud. Et je ne comprends pas tellement ce qui m’arrive. Je prends la main de Lexie et mon verre de l’autre et donne mon nom au serveur en lui disant que je reviendrais. Il me dit qu’il ne peut pas vendre des boissons à crédit mais je pars. C'est dans ces cas-là que je regrette d'avoir bu, encore et encore. J'aurais pu m'arrêter à un ou deux verres, et suivre les conseils intérieur du serveur, mais non. Bouuh, je me hais. Je traverse la salle qui a l’air toujours aussi concentrée sur l’autre blondinette qui danse.
Dehors. L’air libre. Mes pensées se remettent en place rapidement et je lâche la main de Lexie. J'enlève ma veste en cuir pour la tenir dans ma main droite, cette même main qui quelques secondes avant tenait celle de Lexie. Question super héros, j'assure à max! Mais niveau gros buveur, ça, c'est moins sur. Et les deux combinés, oh mon dieu... Cette soirée commence à devenir très bizarre. (tout comme mon rp pourri)

« Désolé. Je crois que je suis quelque peu… Pompette. »

A peine avoir terminé ma phrase que Lexie me saute au cou en me remerciant. Malgré tous ses cheveux qui me viennent au visage, je l’enlace quelques secondes et la repousse délicatement. Je souris et prend une posture d’héros.

« Ce n’est rien. »

J’imagine une jolie cape rouge accroché autour de mon dos et m’envoler. Mais c’est malheureusement impossible. Je me remets droit, les mains dans les poches avec la veste qui tient sur mon bras et commence à rire.
Il n’y a rien de drôle, mais je ris. Je me rappelle que j’avais un verre dans la main, mais où est il passé ? Je ris encore. Cette Lexie doit me prendre pour un taré. Tant pis. De toute manière, tout se bouscule dans ma tête. Je n’sais pas trop c’que j’fous ici. En dehors du club alors que j’étais si bien installé.
Un coup de vent souffle. Je regrette immédiatement d’avoir enlevé ma veste. Je le remets avec hâte et claque légèrement des dents. L’hiver a commencé il y a quelque temps, mais n’est pas prêt de partir. Bouuh, je jette un œil à Lexie.

« Je crois qu’on serait mieux dans la cage d’escalier. » fis-je.

Même si j’ai très envie de faire la tournée des bars, je sais très bien que les proprios ne vendrons jamais de l’alcool à un saoul, car ils savent très bien que je resterais ici à cuver et faire fuir la clientèle. Merde, de merde, de merde. Je veux une bière, grrr.
Je commence à avancer vers la porte d’entrée et tape avec difficulté le code de l’immeuble. Je fais signe à Lexie de me joindre, à part si elle préfère avoir froid, qu’elle reste là-bas. J’attends un peu, tenant la porte pour éviter qu’elle ait la même galère que moi pour ouvrir la porte. Les touches du petit clavier sont si petites ! Je m’assois contre la porte, la laissant grand ouverte et en créant un courant d’air monstrueux. Malgré les cocktails que je me suis enfilé, j’ai froid. Trop bizarre.
Je pense donc à un verre. Un verre à pied avec la réserve en forme de V très écarté. Il est frais, quelques gouttes perlent même. Puis je vois un liquide qui s’y remplit, quelque chose de fort, bon et fruité. Et une olive vient flotter au dessus, comme si elle aussi voulait pouvoir nager dans ce délice.
Je secoue la tête, je crois que je suis bel et bien bourré.

Ce putain de verre à la con reste dans mon esprit, j’ai soif. J’ai soif. J’ai soif !

« Ca va pas? »

Bah si ça va écoute. J’ai juste soif. Et puis j’ai froid. Et soif. Enfin, voilà, la routine. Quelques secondes après, je me rends compte que je parle à moi-même. Dans ma tête. Je tourne alors la tête vers elle, elle est assise contre le mur, les jambes contre le carrelage froid. Je roule alors, laissant la porte se refermer avec une douceur infinie, comme si elle s’en foutait qu’on ait froid, la connasse. Puis le courant d’air s’arrête.
Je n’avais jamais testé le hall, pour dormir. C’est confortable, malgré la fraicheur qui stagne à cause de la fente entre le sol et le bas de la porte. Je lève la tête pour voir où est la danseuse et lui sourit.

« Je vais très bien, merci. » répond-je longtemps après.

Ouai bon, mon cerveau, c’est pas le plus rapide quand je suis bourré. Je repose ma tête sur le carrelage gris, et regarde le plafond. C’est carrément crade ! Jamais on lave ici ? D’ailleurs, le sol est peut-être du même état. Je me lève vite, chancelant quelque peu. Ma tête tourne d’un coup, et je préfère m’asseoir sur ce sol crado que de me cogner quelque part et terminer aux urgences.
Je regarde où je suis tombé. Mes fesses me font un peu mal, mais ça ne me tuera pas. Lexie est juste devant moi. Je lui souris une nouvelle fois et donne un léger coup dans son pied droit, ou gauche, j’en sais trop rien… Juste pour montrer que je suis là, quoi.

Il met longtemps à me répondre. Peut être qu'il en a carrément marre de ma compagnie, des mes questions, de mes soupirs et tout le tralala. Il me regarde. Il regarde le sol. Puis daigne à me répondre une poignée de minutes qui me paraissent une éternité qu'il va bien. Mouais. Ça n'a pas vraiment l'air, s'il veux mon avis. Mais il ne le veut pas.

« Je vais très bien, merci. »

J'acquiesce. Puis je rigole, "je vais très bien, merci" N'importe quoi! Mais non, bien sur, mec tu n'es pas bourré du tout, tu as juste bu quelques verres et tu ne mets pas dix minutes à répondre à la question la plus simple du monde qui consiste juste à savoir comment tu vas. Il s'allonge, et regarde le plafond, l'air dégouté. Je regarde le plafond à mon tour, et ne remarque rien d'extraordinaire, à part un plafond gris sale, avec des traces noires, qui devait être peint en blanc à l'origine, à mon avis. Je baisse la tête. Il se relève, se frotte la tête, se rassois. Je n'ai aucune idée de ce qu'il est en train de faire. J'ai un peu froid mais ne le relève pas. Parce que tout le monde sait que dans les films, la nana dit qu'elle a trop froid, sous entendu "donne moi chaud par tous les moyens", enfin mets moi dans ton lit quoi. Je sais que c'est tiré par les cheveux, mais je n'ai pas envie que Sam ne s'imagine des choses et des avances.
Le concierge sort de sa loge. Il a un visage cramoisi, comme d'habitude j'aimerais dire. Mais il a l'air encore plus énervé que d'habitude. Il nous crie dessus en nous "demandant" de partir, de, je cite, lever nos petits culs à la con de son sol, et de filer dans nos appartements car il en a ras le bol des gens qui trainent dans le hall de l'immeuble, et menacent de nous frapper à coup de balai. Et là, j'ai peur. Parce qu'il l'a déjà fait, frapper avec un balais. Sans rire! Et je peux vous dire que ça fait peur, très peur. Je me lève vite en riant de plus en plus fort et monte dans l'ascenseur en attendant Sam.

Je continue à tapoter mon pied contre le sien, je trouve ça rigolo. De toute manière, tout pourrait me faire rire dans l’état où je suis. Tout sauf ce qui va se passer.
J’entend une porte qui s’ouvre, mais rien d’alarmant : il y a des partout ici ! Le seul problème, c’est que ce n’est pas n’importe laquelle, c’est la porte du concierge qui sort tout rouge. Je ris. Peut-être un peu fort. Et apparemment, j’ai fais trop de bruit. Comme par hasard, et merde. Il commence à nous dire qu’il va nous sortir de là avec son balai. Son balai ? Je ris encore.
Je vois Lexie qui se lève, donc mon jouet se déplace. Je bouge mon pied encore quelques secondes dans le vide, mais c’est sérieusement moins marrant. Donc je me lève aussi, de un : je ne veux pas être tout seul, de deux : je vois le concierge qui entre chez lui pour chercher son putain de balai, de trois : ce ne serait pas très sympa pour la danseuse. Je me lève alors à toute vitesse et entre vite dans la cage en chancelant un peu. Je manque de tomber, mais les portes se referment pique au moment où l’autre con qui nous sert de gardien sortait avec son balai.
Je lui tire la langue en riant et quand enfin je suis seul avec la danseuse, je m’assois doucement par terre, me laissant glisser contre la paroi. Je ne me sens pas si bien. J’espère ne pas vomir devant elle, sinon adieu mon sex appeal. Je ferme les yeux, et je sens que l’ascenseur n’a pas commencé à monter. Nous sommes donc toujours coincés devant le con. Flippant.

« Six ! Appuie sur le six ! », fis-je doucement mais pressé.

J’entends un petit clic, signe qu’elle a appuyé, et je m’apaise. La cage d’ascenseur se lève, doucement mais sûrement comme on dit. Pfiouu, on l’a échappé belle, parce que je n’aurais pas voulu me faire fouetter le derrière par un balai, sans façon !

« On a eu chaud. » ris-je, une nouvelle fois.

J’ouvre une paupière et regarde la danseuse. Je ris encore, pensant à la tête de ce vieux. Il aurait pu faire un attaque tellement on l’a fait chié. Moi qui trouvais la soirée bizarre, je commence à l’apprécier. Et elle n’était pas encore terminée. La compagnie de la danseuse ne me gêne pas, et vu l’envie de bière toujours aussi présente, je vais m’en boire une. Fraiche et incroyablement bonne, j’en suis sûr (la bière, hein…). Et j’en offrirais une à la danseuse, elle doit avoir soif aussi.
Quand enfin les portes s’ouvrent, je me lève doucement en faisant tanguer la cage quelque peu et sort en chancelant. D’un geste de la main, j’invite la belle à me suivre. Je m’arrête à trois pas de l’ascenseur. Petit problème.
Où-est ce que j’habite ?
Je crois que c’est à gauche. Enfin… Ou peut-être le deuxième appart’ à droite. Ouh putain. La merde dans laquelle je me suis foutue. Je sors mes clefs et vais au hasard au fond à gauche du couloir. J’essaye, avec énormément de mal, de mettre la clef dans la serrure, et avec beaucoup d’essais non concluant, j’y arrive enfin. Je tourne la clef, et apparemment, aucune résistance. Je suis un boss, même bourré.

« Entrez mademoiselle. » souris-je en la laissant passer la première.

Une fois rentrée, je ferme la porte derrière moi et me dirige directement dans la cuisine. Ni une, ni deux, je me ramasse méchamment contre le sol. Super ! Mais le frigo est à deux mètres, je me lève, ayant le genou qui souffre et me dirige vers le frigo. Je prend deux bières et revient au salon.

Oh mes bébés. Mes petites bières chéries.
J’en tends donc une à la danseuse et garde la dernière dans mes mains froides. Je m’assois sur mon vieux fauteuil en cuir troué tout moelleux et ouvre avec jubilation la petite bouteille en verre. Un petit souffle s’échappe lors de l’ouverture et je bois hâtivement. Ô plaisirs intense. Génial. Après trois ou quatre grosses gorgées, je ressens les effets des cocktails du club plus la bière. Je regrette amèrement d’avoir bu aussi vite mais c’est si bon !

« Trop bon. » fis-je en me balançant.

La musique du club fait vibrer mon vieux parquet et fait balancer mes cadres accroché au mur. Heureusement que je ne travaille pas demain, car je vais avoir une sacrée gueule de bois. Mais tant pis, cette soirée devient très agréable.

« Quel âge tu as ? » la questionnes-je.

Je lève un peu la tête mais la repose aussi tôt en sentant que je divague. Je ferme les yeux, et pose ma bière sur mon front. Géant. Je suis si bien, sur ce fauteuil, avec cette bière, en charmante compagnie, et totalement bourré. Je mets les pieds sur ma table basse et m’allonge. Avec un petit grincement, le dos du fauteuil s’abaisse avec facilité. Encore mieux !
Je tourne ma tête doucement vers la danseuse en levant une paupière. Elle est allongée dans le canapé, serrant la bière comme un enfant. C’est trop mignon. Je ris doucement et ferme les yeux. Ce qui est bizarre, c’est qu’elle prend une cuite avec un inconnu (un inconnu totalement canon), qu’elle ait des ennuis à cause de l’inconnu mais qu’elle le remercie quand même (bah oui, on ne peut résister au bel inconnu), puis qu’elle monte dans l’appartement de l’inconnu sans broncher. Je pourrais être un méchant violeur, qu’elle me suivrait quand même.
Je me balance un peu plus fort sur mon fauteuil tout en buvant ma bière, c’est si bon.

La dernière goutte tombe sur mes lèvres. Roh, faut-il que cette bière se termine ? Je pose la bouteille par terre, ou plutôt je la laisse tomber de là où je suis. J’entends un léger bruit, et voilà, du verre cassé et c’est moi qui va devoir ramasser. Pas grave, pour l’instant, ce n’est pas trop le problème. Le souci, c’est que je n’ai plus à boire. Et le meuble où je mets toutes mes bouteilles chéries est bien trop loin.
Du coin de l’œil, je vois que la danseuse a aussi terminé sa petite bouteille. Elle a l’air tout aussi déçue que moi. Je m’apprête à me lever quand j’entends un petit « 23 ». VINGT TROIS ANS ?! Mais quelle fille peut danser sur scène comme ça à vingt trois ans ? Oh mon dieu, je crois que je suis tellement bourré que je la croyais plus vieille. Vraiment plus vieille. Peut être trois ans de plus ? J’en sais rien, mais en tout cas ça me surprends.
Je la vois debout, qu’est ce qu’elle fout ? Elle va me servir un verre ? S’il vous plait mon dieu, qu’elle me sert un verre ! Ah non. Apparemment elle... Monte sur ma table. J’espère qu’elle ne va pas la casser car je crois qu’avec tous les verres que j’ai pris au club, je ne pourrais racheter une table de ce type avant... Longtemps. Très longtemps. Elle retire ses talons après avoir commencé à danser. Imaginez juste qu’elle est aussi ivre que moi. Donc : alcool + retirage de chaussures = chute assurée. Je grimace en entendant le choc de ses fesses contre le bois, pauvre table.
Je me lève alors, l’applaudis et me dirige vers mon meuble à alcool et ouvre le portière avec un petit souffle de plaisirs. Plusieurs bouteilles s’offrent alors à moi, je les entends presque me murmurer de les choisir elle, et non les autres. Je prends la première et WHISKY !
Je retourne à ma place et bois une petite gorgée à la bouteille et la tends ensuite à la danseuse.

« Santé, encore une fois ». Souris-je en avalant le doux liquide.

La gorge me brûle, mais j’adore ça. J’aimerais me saouler tous les soirs ! Mais qu’est ce que j’aimerais pas être le lendemain, c’est affreux. Mais ne pensons pas à ça tout de suite.
Je me demande comment cette musique peut l’entrainer, comment est-ce que ce rythme répétitif peut lui donner envie de danser ? Mais bon, chacun ses gouts après tout. Je me remets confortablement dans mon fauteuil, reposant mes pieds sur la table et en baisse le dossier assez pour être bien, mais pas trop pour garder un œil sur la danseuse, je crois que ça devient intéressant.

Je lui passe la bouteille avec beaucoup de peine, mais il faut bien partager ! Et quand je me rassois dans mon bon fauteuil bien moelleux, je me dis que j’ai bien fais de l’acheter. Tous mes muscles se détendent, et c’est comme si j’étais sur un nuage.
La musique recommence, et je sens ma table basse vibrer. Ce club met vraiment le son bien trop fort ! C’est infernal, mais bizarrement, ça ne me gêne pas temps que ça ce soir. Et puis la danseuse commence à me parler. Je me concentre pour l’écouter et lève les yeux vers elle. Elle me confit qu’elle croyait que cette soirée allait être complètement merdique, comme toutes celles qu’elle passe (alors que moi je fais la fête presque tout le temps, paix à son âme). Puis elle laisse sa phrase en suspension et va se rallonger sur le canapé. Elle termine donc par me dire qu’elle passe, enfait, une jolie nuit en ma compagnie. Comme toutes les autres ma chère.

« Sache, très chère, que je passe aussi une jolie soirée. » souris-je.

Puis je tends mon bras vers elle et lui demande la bouteille. Et oui, faut bien partager. Je dois ressembler à un enfant qui veut biberon, et quel drôle de biberon.
Je crois qu’elle a raison, ce début de nuit commence à devenir très sympa. C’est surtout l’alcool qui nous rend tant gaga, et j’adore. Perso, je préfère me saouler la gueule que de voir mes jours en noir et mes nuits grises. Je vais bientôt terminer tel un toxico. D’ailleurs, j’ai envie de fumer. Je sors mon paquet de ma veste (que j’enlève par la même occasion) et allume mon petit trésor. Je balance la paquet sur la table en le montrant à la danseuse.

« Si t’en veux une, c’est la maison qui offre. » dis-je en tirant une bouffée.

C’est si bon, et je suis si bien.
La vie devient plus simple, et le monde plus beau. Tout à l’air si simple, mais dès demain, dès mon réveil je vais devoir courir dans la salle de bain pour deux choses pas super plaisante. Déjà vomir tout ce que j’ai bu car je crains que mon corps n’apprécie, et avaler une boite d’aspirine avec un grand verre d’eau. Je veux que ce moment continue, encore et encore. Que l’éternité commence maintenant et ne termine que quand j’aurais envie.